Il est des instants où l’on hésite entre rire ou pleurer. Parfois, une chose vous semble tellement absurde que l’on préfère ne pas y croire. C’est un moyen de se préserver, c’est humain.
Dans le cas présent, on peut se persuader que, peut-être, cette histoire n’est finalement que le scénario d’un film d’anticipation aux grosses ficelles sur les dérives de la modernité. Surtout s’il y a peu de temps auparavant on s’est fait l’intégrale de Black Mirror.
Sauf que là, ils vous expliquent que non. Pas de plaisanterie. Du tout. Du vrai. Du dur. Lève un peu la tête et regarde autour de toi bon sang ! Evidemment vous n’y croyez toujours pas alors ils vous le prouvent. Par A plus B. Et puis le reste de l’alphabet aussi car, vraiment, la frontière de vos connexions synaptiques est aussi difficile à traverser que la frontière mexicaine.
Il nous faut plus de preuves. Aucun problème pour eux. Sans se départir, ils vous balancent alors sur la table des statistiques, des études, des photos, des vidéos et des gens contents. Et même avec tout ça, là, sous nos yeux, quelque part au fond de nous, on se dit qu’il y a encore une chance.
Une petite chance seulement pour que ce soit faux. Une minuscule chance pour que ce monde-là n’existe pas encore. Et on a tort. L’instinct a toujours tort quand il s’agit d’évolution.
Vous vous demandez de quoi je parle ? Normal.
Je parle d’une image qui a affolé les réseaux sociaux il y a peu: Une vache avec un casque de réalité virtuelle que le ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation de la région de Moscou semblait fier de nous dévoiler dans un communiqué officiel.
Une réalité virtuelle qui permettrait, selon leurs dires, de diminuer le stress des vaches et donc d’augmenter et la quantité et la qualité du lait qu’elles produisent. Waw !
Ces effets restent à prouver lors de tests ultérieurs mais il y a un enjeu économique. Evidemment. Le bien-être animal doit si souvent rimer avec économie pour qu’enfin on s’y penche. On pourrait multiplier les exemples.
Vous vous demandez quelles images sont ainsi projetées à ces vaches ? Et bien il s’agit d’un bonheur artificiel naturellement. Des champs verts à perte de vue sous un soleil d’été rasant l’horizon. Voilà.
Donnez-leur ce qu’ils veulent, nous leur prendrons ce que nous voudrons.
Les casques de réalité virtuelle auraient été spécialement adaptés pour les bovins, grâce au travail de vétérinaires et de développeurs. La taille du casque a d’abord été ajustée pour correspondre à la morphologie de la vache. N’est pas humain qui veut. Les ingénieurs auraient également pris en compte les différences entre les yeux humains et le regard bovin : Les vaches étant davantage sensibles au ton rouge mais percevant moins bien le bleu et le vert. Bref tout est étudié, elle va loin la mascarade tout de même.
Je vous avoue que la première fois que j’ai lu cet article, j’ai éprouvé à peu de chose près tout ce que je viens de vous décrire. Aujourd’hui encore j’ai du mal à me persuader que c’est une voie à suivre.
Et puis j’ai retourné le problème. Je me suis mis à la place d’une vache. L’exercice est périlleux, je vous le concède. Serais-je plus heureux en croyant être dans un champ vert baigné de soleil ? Pourquoi pas.
Disons alors qu’il ne faut partir du principe de ne jamais retirer le casque, l’écart avec la réalité serait bien trop brutal.
Et le grand écart, ça ne fait pas toujours du bien, sauf pour Jean-Claude Van Damme évidemment.